> Les oiseaux nicheurs sur la Plaine de Sarliève (1)

L’étude de l’avifaune est ouverte depuis  le 25 mars 2021, avec une première sortie d’observation sur l’espace retenu (environ 105ha, soit tout le sud de cette plaine). Il s’agit en fait d’un recensement des espèces nicheuses, qui aboutira aux nombres de couples nicheurs installés ce printemps 2021. Cela s’appelle faire un « quadrat » - ou aussi, « méthode des plans quadrillés ».

En résumé, il s’agit de mener des sorties pendant lesquelles on doit noter (sur un plan du site retenu), TOUTES les observations faites en les localisant très précisément (en notant à chaque fois : quelle espèce +  quelques informations simples sur le comportement ?).  Au terme d’une douzaine de parcours durant la saison de nidification – ici, de mi-mars à fin mai – il est obtenu des « nuages » de points d’observation de telle et telle espèce, qu’il faut interpréter / traduire en nombre de territoires occupés par un couple pour la reproduction. Au bilan, ces territoires sont donc cartographiés sur le plan de l'espace retenu.

Un peu de technique :

La méthode des « quadrats » (ou « plans quadrillés ») a été définie par les Anglo-Saxons et les scandinaves dans les années 1930. En France,  il a fallu attendre les années 60 pour la réalisation des premiers.

En règle générale, les surfaces choisies pour ces recensements sont inférieures à 20ha. Cela dépend de la complexité du milieu choisi. Une forêt, un marais, un bocage, une ville… sont plus compliqués à dénombrer qu’un « openfield » (vastes espaces sans arbres), comme les espaces agricoles céréaliers ou prairiaux.

En Europe de l’Ouest, la plupart des dénombrements sont menés sur des surfaces de l’ordre de 10-12 ha. Il est alors fréquent d’y observer moins de 20-22 espèces nicheuses. Au-delà d’une telle valeur, l’endroit étudié peut être qualifié de « riche ». Il est rare d’approcher ou dépasser 25 espèces nicheuses. Enfin, il est exceptionnel d’approcher 30 espèces.

Ici, le résultat d'un quadrat de 110ha à Cournon (Puy d'Anzelle + coteau des Vaugondières) qui concerne l'Alouette des champs

Le quadrat de 2000 (à gauche) montre que ces 110ha abritaient : 18 couples d'Al des ch. certains (en vert) + 3 couples incertains (blancs). Ce même quadrat refait en 2017 (à droite) n'abritait plus que 7 couples certains et 1 "incertain"

Voilà donc un exemple de l'intérêt d'avoir un "état zéro" d'un site... et mieux, le refaire / le reprendre 10 ans, 20 ans, 35 ans + tard!

Comment peut-on en arriver à de tels résultats ? L’explication la plus simple est que cette méthode se base sur la propension de la majorité des oiseaux nicheurs de s’installer un espace délimité (par couple) pour la reproduction (à l’inverse de ceux qui nichent en colonie). Chacun d’entre eux définit alors son espace vital où il doit pouvoir se nourrir et mener à bien l’élevage de sa nichée. Ce territoire est alors défendu contre les congénères de la même espèce. 

C’est une méthode avec laquelle on obtient une vision correcte du nombre de couples des x espèces occupant la zone choisie : un  « état zéro » de l’avifaune nicheuse, tel printemps.

Comme le projet de la ferme de Sarliève va bouleverser le modèle agricole en place à partir de 2022, le paysage local sera très modifié en quelques années. Par exemple, les 450m de haie plantés fin février, ne sont qu’un petit prémisse des évolutions radicales qui vont intervenir. Aussi cet « état zéro » des oiseaux nicheurs deviendra aussitôt une référence intéressante à observer dans ses évolutions. Il faudra réaliser de nouveaux quadrats, sur ce même espace, dans 10, 15… ans pour constater les impacts des volontés économiques mises en œuvre sur cette plaine sur les oiseaux.

Depuis le 25 mars, déjà 3 sorties « quadrat » ont été faites. Les Alouettes des champs étaient déjà présentes et le nombre de couples cantonnés commence à « se dessiner ». Elle sera de toute évidence une des espèces nicheuses les plus abondantes. La Bergeronnette printanière est apparue à la sortie du 1er avril, de retour d’Afrique subsaharienne. A la sortie du 8 avril…des mâles se cantonnaient et chantaient déjà. Pour elle, il faudra attendre fin avril pour commencer à visualiser un nombre de couples installés…  Un autre exemple : entre les sorties du 25/03 et du 01/04, le nombre potentiel de territoires de Tariers pâtres est passé de 1 à 3.

Vous le comprenez : les oiseaux sont tous en cours d’installation. Certains ne sont pas encore revenus de leurs quartiers d’hiver africains ou méditerranéens… comme les Rousserolles effarvattes. Certains ne feront que passer comme le Tarier des prés (un vu le 8/04) ou l’Hirondelle rustique, car ce lieu ne leur convient pas ! D’autres encore n’ont pas quitté la plaine de Sarliève, qui est leur territoire d’hivernage. C’est le cas de la Bécassine des marais, vue à chacune des 3 sorties, ou du rouge-gorge (un vu encore le 01/04)

C’est un des grands intérêts de ce type d’études : observer et visualiser qui s’installe ? et où ?, et comment ?, et pourquoi ? Puis au bilan, de révéler que tel espace est capable de nourrir 30 couples de 8 espèces… ou plus de 150 couples de 24 espèces !

Ici, de gauche à droite : Becassine des marais, la Bergerotte printanière, mâle Tarier pâtre

Qu’en sera-t-il de l’avifaune nicheuse de « la plaine de Sarliève » au terme de ce quadrat 2021 ? Puis en 2031 quand il sera reconduit ?  Il ne faut pas cacher que les oiseaux de « la plaine de Sarliève » sont mal connus dans leur globalité. D’emblée, de tels  paysages agricoles n’attirent pas les naturalistes et les archives du passé pour cet endroit sont fort maigres !

Aussi, il est urgent de poursuivre et conclure ce premier quadrat d’ici fin mai. A suivre !

JJ LALLEMANT – 11 avril 2021

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